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Déchéance du droit de conduire : quand la “Vision zéro” devient une réalité à l’échelle européenne

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Pour lutter contre l’impunité de certains conducteurs lorsqu’ils empruntent les routes d’un autre État membre, et réduire drastiquement le nombre de tués, l’Union européenne a pensé un package sécuritaire complet. Celui-ci prévoit notamment la déchéance du droit de conduire, à l’échelle européenne, des conducteurs les plus dangereux.

19 800 : il s’agit du nombre de personnes tuées dans des accidents de la route dans l’Union Européenne en 2024, selon les chiffres préliminaires publiés par la Commission européenne le 18 mars dernier. Cela correspond à une baisse de 3 % par rapport à l’année précédente. Toutefois, cette baisse est bien plus conséquente dans certains pays, comme en Suède et au Danemark. Quand, dans d’autres, a eu lieu une hausse significative du nombre de tués, à l’instar de l’Irlande et de l’Estonie.

“Le rythme global de l’amélioration reste trop lent”, souligne ce même rapport. Et pour cause : l’UE a pour objectif de réduire de 50 % le nombre de tués sur les routes européennes d’ici 2030. Mieux encore : de tendre vers la mortalité zéro d’ici 2050, comme le prévoit son projet “Vision zéro”. Pour ce faire, elle est prête à initier toutes les mesures nécessaires. Y compris à faire appliquer la déchéance du droit de conduire par tout État membre dont l’un des conducteurs aurait commis une grave infraction dans un autre État membre. Explications.

Quid de la réglementation actuellement en vigueur ?

Hier, un conducteur d’un État membre “A”, qui commettait une infraction routière dans un État membre “B”, était rarement inquiété. Puisque cette infraction n’était applicable que dans l’État membre où elle avait eu lieu, aucune conséquence n’était à craindre sur son permis de conduire délivré dans l’État étant, très souvent, celui de sa résidence habituelle.

Néanmoins, les nouvelles mesures communes partagées par la Commission Européenne, puis adoptées en première lecture par le Parlement Européen, dès le 6 février 2024, ont rebattu les cartes. En effet, ce projet de directive prévoit ni plus ni moins de permettre :

  • L’application des restrictions et des sanctions retenues par l’État membre où a eu lieu l’infraction, dans l’État membre ayant délivré le permis de conduire au conducteur qui en est l’auteur.
  • En outre, que cet État membre “de délivrance” les fasse appliquer dans tous les autres États membres de l’UE.

Déchéance du droit de conduire : quelles sont les infractions ciblées par la directive ?

Ce projet de directive, relatif à la déchéance du droit de conduire, concerne les conducteurs de tous les États membres de l’UE. Cependant, certaines catégories d’entre eux sont plus particulièrement en ligne de mire. D’une part, ceux qui commettent régulièrement les mêmes infractions. D’autres part, les plus dangereux. Ainsi, la déchéance du droit de conduire s’appliquera pour :

  • Les grands excès de vitesse : autrement dit, ceux de plus de 50 km/h hors agglomération, et 30 km/h dans les zones résidentielles.
  • La conduite en état d’ébriété et après avoir consommé des stupéfiants ou toute substance psychotrope.
  • Les violations au Code de la route menant à un accident routier impliquant des dommages corporels graves et/ou un homicide involontaire.
  • La conduite sans permis de conduire en cours de validité.

Et celles qui ne le sont pas ?

Le 5 décembre 2024, le Conseil européen a adopté une position dite de négociation concernant certaines décisions de déchéance du droit de conduire, intégrant le paquet législatif relatif à la sécurité routière dans l’UE. Cette position a amené à préciser, notamment, le champ d’application du projet de directive adopté par le Parlement européen le 6 février. Et ce, afin que “tous les États membres puissent mettre en œuvre la directive même lorsque certains types de décisions de déchéance du droit de conduire n’existent pas dans leur système national.”

De fait, n’entreront pas dans le champ d’application de la directive :

  • Les décisions de déchéance du droit de conduire dont la durée est inférieure à trois mois.
  • Celles dont la durée qu’il reste à accomplir est inférieure à un mois.

Préservation des prérogatives réglementaires de l’État membre de l’infraction

Malgré tout, on note que la position de négociation du Conseil ne remet pas en cause la possibilité, pour l’État membre où l’infraction a eu lieu, d’appliquer les décisions de déchéance du droit à conduire, ainsi que les peines principales et complémentaires que ses réglementations nationales prévoient sur son propre territoire. Et ce, “jusqu’à ce que le conducteur concerné remplisse ces conditions.”

Ceci implique, entre autres, que l’État membre de l’infraction est toujours en mesure d’imposer à l’auteur d’une grave infraction routière une période d’interdiction pour renouveler son permis de conduire. C’est le cas dans le Code de la route français pour un certain nombre d’infractions, après l’annulation d’un permis de conduire. Durant cette période d’interdiction, et si l’État membre de délivrance du permis du conducteur incriminé lui renouvelle ce dernier, l’État membre de l’infraction peut refuser de reconnaître ce permis.

Déchéance du droit de conduire : nouvel accord

Le 24 mars 2025, le Conseil et le Parlement européens ont conclu un nouvel accord prévoyant, entre autres :

  • La création d’un permis de conduire européen numérique d’ici 2030.
  • L’évolution des épreuves pratiques et théoriques du permis de conduire dans tous les pays de l’UE, accentuant notamment les apprentissages relatifs à la sécurité des usagers de la route les plus vulnérables et aux systèmes avancés d’aide à la conduite.
  • La possibilité de conduire un véhicule de 4.25 tonnes avec un permis B.

L’évaluation systématique de l’aptitude à la conduite a été écartée au profit d’une auto-évaluation tous les quinze ans. En revanche, le Conseil et le Parlement européens ont retenu la déchéance du droit de conduire en cas d’accident grave. Comme le confirme l’Indépendant dans cet article, elle sera étendue aux 27 États membres de l’UE.

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